L’énergie cinétique de l’ouragan Irma représente quelques mois de la consommation électrique française.
Remarques générales
Cette question est typiquement une question d’ordre de grandeur. Il ne s’agit pas de déterminer précisément l’énergie de l’ouragan Irma, une grandeur qui n’est pas précisément définie, et qui de plus varie au cours du temps. L’objectif est d’obtenir un ordre de grandeur et de trouver une quantité d’énergie connue de taille comparable.
De quelles informations disposons nous ?
Pour cette situation nous disposons de photos satellite, et surtout de visualisations météo, comme le propose par exemple le site https://www.ventusky.com/ qui propose des cartes de la situation météo et des prévisions à court terme. Ce site propose de nombreuses options pour visualiser notamment la température, la pression, et la vitesse du vent à diverses altitudes (et cela sur tout le globe).
La vidéo qui suit montre une prévision de l’évolution d’Irma.
Cette video permet de déterminer la taille d’Irma. La distance entre Cuba et le sud de la Floride est de l’ordre de 200 kilomètres. Nous pouvons en déduire que la zone de vents intenses a un rayon d’environ 100 kilomètres. Les indications sur le site, ainsi que les information sur les sites d’actualité annoncent une vitesse typique du vent de l’ordre de 200 kilomètres à l’heure.
L’énergie cinétique Intégrée
Ces deux informations permettent de faire une première estimation : celle d’une grandeur dénommée « Energie cinétique intégrée » (IKE : Integrated Kinetic Energy). Cette grandeur a été définie dans l’article « Tropical cyclone destructive potential by integrated kinetic energy » ( Powell, Mark D., et Timothy A. Reinhold. « Tropical cyclone destructive potential by integrated kinetic energy ». Bulletin of the American Meteorological Society 88, no 4 (2007): 513–526. L’article est accessible en ligne : https://doi.org/10.1175/BAMS-88-4-513 ) . Il s’agit de l’énergie cinétique d’une couche d’air épaisse de 1 mètre et qui a comme vitesse la vitesse du vent à 10 mètres de hauteur par rapport au sol.
En prenant une masse volumique de 1 kilogramme par mètre cube, nous trouvons pour cette énergie cinétique d’une couche de 1 mètre d’épaisseur une valeur de 60 térajoules.
Cette évaluation est confirmée par une image du Washington Post reproduite par la compagnie RMS Et comparant l’énergie de différents ouragans.
Energy is an important metric to measure #hurricane strength, @washingtonpost looks at @hwind view on #Irma https://t.co/kjDS5QH0cP pic.twitter.com/Vl0HRyxUmg
— RMS (@RMS) 8 septembre 2017
Par ailleurs, durant l’ouragan, cette compagnie a régulièrement posté des cartes de vitesse de vent qui indiquaient l’énergie de l’ouragan (avec deux zones d’intégration : le coeur des vents très rapide et une zone plus large). Sur la suivante par exemple, il est indiqué une énergie de 85 terajoules
#Irma starting to move NW, max wind to near 120 mph, Integrated Kinetic Energy 85 TJ based on @53rdWRS, @NOAA_HurrHunter sfmr measurements pic.twitter.com/UORsyXAQE4
— RMS HWind (@hwind) 10 septembre 2017
L’énergie cinétique totale
Pour déterminer l’énergie totale, il ne reste plus qu’à multiplier l’énergie obtenue par la hauteur de l’ouragan. En observant les cartes de vitesse du vent en fonction de l’altitude, on se rend compte qu’il est raisonnable de prendre une hauteur de 5000 mètres. Ce qui conduit à une énergie totale de 0,3 Exajoules, à comparer aux 1,8 Exajoules de la consommation électrique annuelle de la France. (500 terawatt heure.
Ainsi, selon les hypothèses de calcul, on trouvera une énergie cinétique totale pour l’ouragan Irma comprise entre un mois et un an de consommation électrique de la France.
4 commentaires sur “L’énergie de l’ouragan Irma”
L’énergie cinétiquen’est sans doute pas la composante principale de l’énergié totale d’un cyclone tropical. La composante principale est sans doute l’énergie de vaporisation de l’eau de mer, transformée en nuages puis en précipitations diluviennes (voir Harvey et des prcipitations de plusde 1 mètre sur de l’ordre de 100 000 km2 !).
Vous avez tout à fait raison. Dans les bilans d’énergie d’un ouragan, les effets thermodynamiques et notamment la vaporisation/condensation de l’eau jouent un rôle déterminant (avec des valeurs près de 100 fois plus importantes que la composante mécanique / valeur issue de discussions orales avec des collègues climatologues).
En revanche, c’est essentiellement la partie « énergie cinétique » qui détermine le potentiel de destruction des ouragans. L’un des indicateurs utilisés est ainsi « l’énergie cinétique intégrée ». C’est pour mettre en avant cette quantité que j’ai centré cette question d’ordre de grandeur sur l’énergie cinétique.
On doit pouvoir faire le même genre de petit calcul sur la puissance thermique: avec ne serait-ce que 5 cm/jour d’eau à condenser sur toute la surface, pour une chaleur latente de 2000 kJ/kg, ça fait déjà quelques centaines de térawatts, ~ 10 fois la production électrique mondiale.